[Focus] Risques vectoriels : quelle incidence de la végétalisation urbaine

Publié le 28 avril 2025, par Nicolas Rousseau
Quels liens existe-t-il entre végétalisation des aires urbaines et risques vectoriels ? Tel est l’objet d’étude du projet V2MOC (Végétalisation des métropoles d’Occitanie et possibles impacts sur les maladies vectorielles) que pilote Florence Fournet, directrice de recherches au sein de à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). Six points pour comprendre.
Projet V2MOC
L’objectif premier est d’évaluer les risques infectieux vectoriels dans des sites urbains végétalisés au regard notamment de la présence du moustique tigre. Lancé en 2021, le projet concerne les villes de Montpellier et de Toulouse. « À Montpellier, nous avons ciblé des sites intra-urbains végétalisés. Nous avons réalisé une première année de collecte de moustiques en 2023. Le programme se terminera fin 2025 », indique Florence Fournet, directrice de recherches au sein de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), pilote du projet.
Déploiement du projet
Une fois les insectes collectés, « nous procédons à leur étude. Il n’est pas simple d’identifier si le vecteur est porteur d’un virus. L’idée est d’abord d’étudier la présence et l’abondance de potentiels vecteurs dans des zones végétalisées en regard de zones moins végétalisées ». À Montpellier, la présence du moustique tigre est attestée partout où ont été placés des pièges, avec des variables selon les zones. « Les zones vertes profitent de conditions microclimatiques favorables. Le moustique tigre vient s’y reposer et s’y mettre à l’abri. En outre, on s’aperçoit qu’il y a un optimum de température qui favorise son abondance. »
Végétalisation des espaces urbains
Création de parcs urbains, plantation d’arbres, aménagement de jardins communautaires : les actions de végétalisation visent à améliorer le bien-être des urbains tout en permettant une restauration de la biodiversité. « Les villes concentrent de plus en plus d’habitants, dans des milieux davantage pollués, marqués par une érosion de la biodiversité, avec des phénomènes de création d’îlots de chaleur dus à l’imperméabilisation des sols. D’où la nécessité de rafraîchir les villes, de fournir des espaces d’activité à leurs habitants et de leur proposer une reconnexion à la nature », liste Florence Fournet.
Effets des programmes de végétalisation
Favorables pour les sols et la biodiversité, ces programmes participent à la réduction de la pollution, grâce au captage des polluants atmosphériques par la végétation. De ces services écosystémiques découlent des bénéfices directs pour la santé humaine (affections respiratoires, problèmes cardiovasculaires, santé mentale). Mais il y a aussi des effets négatifs. Ainsi, les arbres dégagent des composés potentiellement nuisibles, au-delà des problèmes de pollens. En outre, les arbres de haute taille limitent le brassage d’air requis pour atténuer la pollution. De plus, la création de corridors verts multiplie les rencontres avec des animaux sauvages.
Risques vectoriels
La végétalisation attire des arthropodes (moustiques, tiques) pouvant être impliqués dans la transmission de maladies vectorielles. On trouve chez les tiques une large panoplie d’agents pathogènes à l’origine de la maladie de Lyme, de l’encéphalite à tique, voire de la fièvre hémorragique Crimée-Congo. D’autres agents pathogènes causent des épidémies de leishmaniose, telles celles à Madrid entre 2009 et 2012 liées à l’aménagement d’une forêt en périphérie de la ville et fréquentée par les habitants. En Afrique, la transmission du paludisme en ville est très liée à l’agriculture urbaine. Les maladies véhiculées dépendent évidemment du contexte géographique.
Applications du projet
Un outil de diagnostic moléculaire est en cours de mise au point. Il doit permettre de comprendre sur quelles plantes le moustique tigre, mâle ou femelle, vient prendre des jus sucrés nécessaires à sa survie. « On espère identifier les plantes favorables à la présence de moustiques. C’est la question que nous posent les métropoles pour déterminer ce qu’il faudrait planter pour ne pas voir les moustiques vecteurs pulluler. Notre étude doit permettre d’accompagner les collectivités territoriales dans leurs programmes de végétalisation urbaine, afin de comprendre et gérer les risques vectoriels. »